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Le concours d’architecture est-il menacé ?

Définition : c’est la procédure par laquelle un demandeur – le maître d’ouvrage – compare tous les projets architecturaux relatifs à une commande donnée, pour retenir le meilleur à son idée, qui sera alors réalisé. On l’appelle aussi concours de maîtrise d’œuvre. C’est l’Ordre des architectes qui fixe les règles du concours.

Il suffit d’être architecte, dans un bureau d’études ou pas, en équipe ou pas, ou même étudiant en archi, pour participer. De l’esquisse au projet plus abouti, cela consiste à donner corps à un cahier des charges (bâtiment public ou privé, particulier ou professionnel). Les participants sont mis en concurrence et le projet le plus abouti rafle la mise. Qu’on s’appelle Jean Nouvel ou «X», l’important c’est de participer. C’est ainsi que les architectes en herbe peuvent se faire la main, que les idées se mélangent, s’améliorent, la joute favorisant l’émulation et la création. Ensuite, le jury – dont les membres ont un pouvoir délibératif ou consultatif – décide. S’il y a généralement un seul gagnant (décidé en une journée), les perdants dont le dossier a été sélectionné sont indemnisés.

Mais pourquoi parle-t-on du concours d’architecture aujourd’hui ? Est-il menacé ? Si oui, par qui ? Et pourquoi ?

Selon le gouvernement qui défend sa loi ELAN, le concours ne serait plus obligatoire.

 

«C’est toujours optionnel : c’est-à-dire qu’un bailleur social qui souhaite réaliser un concours d’architectes pourra bien évidemment continuer à la faire…»

Le sujet qui fait polémique, c’est le concours pour la construction de logements sociaux. Vu du gouvernement – on va faire simple –, le concours serait une procédure longue et coûteuse. Certes, il faut construire au moindre coût, chaque sou étant aujourd’hui compté dans la gestion publique, tout en restant fonctionnel et, si possible, esthétique. Car c’est, à la longue, ce qui compte… pour les habitants. D’où l’importance de la concertation : on ne peut pas, par exemple pour la rénovation d’une HLM, se passer de l’avis des associations de locataires ou des personnes impliquées dans la vie locale.

On ne peut pas non plus, pour des raisons uniquement économiques, se limiter à une uniformisation de réalisations. Rien de pire que les «barres» ou les blocs qui se ressemblent. A ce titre, le nouveau quartier parisien qui enserre le square Martin Luther King (Paris XVIIe) est un exemple de réussite de «greffe urbaine» : chaque projet ayant fait l’objet d’un concours d’architecture, l’ensemble produit un effet de cohabitation harmonieuse, les bâtiments de bureau et d’habitation étant pourtant très typés, avec leur effet cassé-construit saisissant. Ce projet extrêmement pensé montre l’importance de la richesse des points de vue à la conception du projet.

Quant aux normes sur lesquelles certains politiques veulent passer, elles satisfont quand même à des critères fondamentaux : de solidité, de salubrité, de performance énergétique, bref, de confort de vie. Et plus on associe en amont les particuliers et les professionnels autour d’un projet de bâti, plus le résultat risque d’être satisfaisant. On ne peut plus construire contre les élus locaux, contre les habitants, contre l’environnement…

Quid de l’argument du délai, censé être trop long, évalué à 6-8 mois selon les autorités ? Des éléments de réponse par Michèle Attar, directrice générale de la SA HLM «Toit et Joie», qui développe ses arguments dans une tribune publiée sur architectes.org :

«Les détracteurs de concours arguent que ceux-ci allongent les délais d’opération et coûtent cher. Je pense sincèrement que c’est un faux problème. En moyenne on met 5 ans à sortir une opération (entre l’étude du terrain et la livraison des logements). Le concours peut être inclus (souvent en temps masqué) dans ce délai. L’opération va vivre entre 50 et 80 ans. Qu’est-ce que 4 mois à l’échelle de vie de l’opération et des enjeux qu’elle représente ? Car en effet le délai d’un concours n’est que de quelques mois.»

L’architecture, comme elle le dit si bien, est un métier « à la croisée de l’art et de la technique ». Et la technique sans art, on l’a vu dans les années 60-70, ce sont les barres de La Duchère (Lyon) que l’on finit par détruire, quand elles ne font pas fuir ses habitants…